Conférence de Anne-Lyse Renon, chercheuse associée LIAS - IMM (EHESS / CNRS - UMR 8178), Nadine Gastaldi, conservatrice en chef au département Cartes et plans, AN, et Emmanuelle Giry, conservateur au département de l’Éducation, de la Culture et des Affaires sociales, AN

Les Archives nationales conservent de très nombreux documents cartographiques et topographiques, allant du XVIe siècle à nos jours. On les trouve en exemplaires manuscrits uniques comme en exemplaires gravés ou imprimés, a priori multiples (sans qu'ils perdent de leur préciosité ou de leur intérêt). En ce qui concerne l'étude de ces documents, la spécificité des Archives nationales - par rapport à beaucoup de collections de bibliothèques ou de centres documentaires - est de permettre souvent d'en comprendre le contexte de production ou d'usage. Les Archives nationales offrent aussi le moyen - plus rare - de documenter la construction des cartes : si le fonds du Laboratoire de cartographie de Bertin à l'EHESS est, sur ce point, un exemple exceptionnel, il n'est pas unique et l'on peut évoquer tout ce qu'apporte en la matière, pour les XVIII-XIXe s., les séries Marine des Archives nationales.

Le laboratoire de cartographie de Jacques Bertin (1918-2010) est créé en 1957 comme laboratoire de service la VIe section de l’EPHE ; il devient par la suite un véritable laboratoire de recherche, le « Laboratoire de graphique » jusqu’à sa fermeture en 2000.

À la fois lieu de travail et de collaboration étroite avec les chercheurs de l’EHESS et de réalisation de travaux graphiques pour eux. Il est aussi réellement un lieu d’expérimentation sur les représentations graphiques. Les réflexions peuvent se donner à lire dans deux ouvrages majeurs La Sémiologie graphique parue en 1967 et La Graphique et le traitement graphique de l’information en 1977.

Les archives du laboratoire ont fait l’objet de deux campagnes de collecte successives en 2001 puis en 2015 à l’occasion du déménagement de l’EHESS de ses locaux du 131, boulevard Saint-Michel. Ces deux opérations ont conduit à la constitution d’un fonds d’archives exceptionnel par son caractère intégral et polymorphe. Outre les dossiers de fonctionnement de service, ce fonds protéiforme comporte les fameuses matrices ordonnables, des dossiers de travaux avec chercheurs, une collection des cartes réalisée par le laboratoire, des documents audiovisuels, des photographies. Le laboratoire ayant collaboré aux recherches les plus importantes en sciences humaines et sociales du second XXe siècle, les documents remarquables sont innombrables : sont ainsi conservés l’intégralité des dossiers de constitution de l’Atlas de la Révolution française, les planches originales des illustrations des articles des Annales de 1960 à 1977, etc. Plusieurs travaux d’exploration de ce fonds ont commencé ; dans la lignée de ceux menés à l’occasion de l’exposition intitulée Design et recherches en sciences sociales. De la sémiologie graphique de Jacques Bertin à la visualisation de données (novembre-décembre 2017), les Archives nationales s’associent à Anne-Lyse Renon, commissaire de cette exposition, pour en dévoiler les richesses.